Que faire du politicard ?

Parce que son sujet fait l’anthropologie une sous-discipline fortement vulgaire de la primatologie, il faut lire et relire Frans de Waal. Chacun pourra constater qu’on ne trouve sous sa plume rien qui puisse justifie son optimisme un peu niaiseux quant aux vertus morales du sapiens sapiens.

On y apprend en revanche que dans le parc de Masai mara au Kenya…

« Une troupe de mâles qu’étudiait Robert Sapolsky (….) traversait tous les jours le territoire d’un autre groupe pour accéder à une décharge située près d’un gîte pour touristes. Seuls les mâles les plus puissants et les plus méchants parvenaient à bon port. Cette manne valait indiscutablement la peine d’en découdre, jusqu’au jour où le gîte jeta de la viande infectée de tuberculose bovine, qui décima tous les babouins qui en consommèrent. La troupe qu’on étudiait (…) devint du jour au lendemain une oasis inattendue de paix et d’harmonie dans le monde impitoyable des babouins (…) ce modèle persista pendant une dizaine d’année alors qu’il ne restait aucun mâle du groupe d’origine ».

Frans de Waal, Le singe en nous, Paris, Librairie Arrthème Fayard, 2006. Réed. Coll. Pluriel 2011, 323p. (p.189) Trad. Marie-France Paloméra

La conclusion s’impose d’elle même. L’élimination physique du singe qui prétend être roi est garante de paix et de sérénité. Reste à en tirer les conséquences : où réside exactement le problème moral ? Dans l’élimination physique systématique de ceux qui prétendent régner ? Ou dans le fait de les laisser faire ?
A défaut, l’émasculation serait un premier pas vers la sagesse – à court terme, une certitude de tranquilité, et à long terme, peut-être le moyen d’un eugénisme pacificateur…

Publicité

Crucifier Narcisse

Le Prince de Machiavel ne l’emporte que si on le laisse faire au-lieu de le traiter comme il se devrait. Je relève chez Frans de Waal :

« Dans les sociétés égalitaires, les hommes qui essaient de dominer les autres se heurtent à un travail de sape systématique, et la fierté masculine s’attire la réprobation. (…) De même le candidat au rôle de chef qui croira pouvoir dicter aux autres ce qu’il doivent faire s’entendra dire sans ambages que ses grands airs sont à se tordre de rire. L’anthropologue Christophe Boehm a étudié ces mécanismes de nivellement. Il a découvert que les chefs qui devenaient tyranniques, pratiquaient l’autoglorification, ne redistribuaient pas les biens et négociaient avec les gens de l’extérieur à leur propre avantage perdaient le respect et le soutien de leur communauté. Si les tactiques habituelles – la raillerie, les commérages et la désobéissance- échouent, les égalitaristes ne répugnent pas à prendre des mesures extrêmes. »



Frans de Waal, Le singe en nous, Paris, Librairie Arrthème Fayard, 2006. Réed. Coll. Pluriel 2011, 323p. (p.97-98) Trad. Marie-France Paloméra

 

 

A faire : se procurer les publications de Christophe Boehm.

Même pour les champignons…

Lettre ouverte à Monsieur Boutet

Cher Monsieur,

je viens de tomber sur cet article, qui raconte comment votre carte interactive des recoins à champignons se fait hacker.

Comme vous, je suis un fervent partisan du logiciel libre et du partage de connaissances.

En revanche, si je ne peux cautionner les méthodes de pirate de la personne qui sabote votre carte interactive, je voulais soumettre quelques observations à votre sagacité.

En premier lieu, je suppose que cela ne vous avait échappé, les champignons ont ceci de différent avec les logiciels qu’ils sont en nombre limité. Un logiciel peut être ce que les économistes appellent un bien public, c’est-à-dire faire l’objet d’une utilisation non-rivale et non-exclusive. Je n’approuve guère la jalousie des chercheurs de champignons – eux-mêmes bien souvent braconniers de champignons – mais cette jalousie elle-même montre que le « bien » est rival et exclusif. Lire la suite

égoïsme ?

« Je ne me fais pas l’avocat d’une moralité fondée sur l’évolution. (…) J’insiste sur ce point parce que je risque d’être mal compris par les gens, bien trop nombreux,  qui ne peuvent faire la différence entre affirmer ce que l’on croit être  et militer pour ce qui devrait être. (…) attention, si vous voulez comme moi construire une société dans laquelle les individus coopèrent généreusement et sans égoïsme pour réaliser le bien commun,  vous ne pouvez attendre beaucoup d’aide de la Nature. »

Richard Dawkins, Le Gène égoïste, Armand colin, 1990. (Trad Laura Ovion).