Plus qu’une citation, un hommage. Albert, toujours remarquable. Quelques lignes avant que ne soit évoquée la mystification « qui veut nous faire croire que la politique de puissance, quelle qu’elle soit, peut nous mener à une société meilleure où la libération sociale sera enfin réalisée ».
– L’avenir est bien sombre.
– Pourquoi ? Il n’y a rien à craindre puisque désormais, nous sommes mis en règle avec le pire. Il n’y a donc plus que des raisons d’espérer et de lutter.
– Avec qui ?
– Pour la paix.
– Pacifiste inconditionnel ?
– Jusqu’à nouvel ordre, résistant inconditionnel – et à toutes les folies qu’on nous propose.
– En somme, comme on dit, vous n’êtes pas dans le coup ?
– Pas dans celui-là.
– Ce n’est pas très confortable.
– J’ai essayé loyalement d’y être. J’en ai pris des airs graves ! Et puis je me suis résigné. Il faut appeler criminel ce qui est criminel. Je suis dans un autre coup.
– Le non intégral ?
– Le oui intégral. Naturellement, il y a des gens plus sages qui essayent de s’arranger avec ce qui est. Je n’ai rien contre.
– Alors ?
– Alors, je suis pour la pluralité des positions. Est-ce qu’on peut faire le parti de ceux qui ne sont pas sûrs d’avoir raison ? Ce serait le mien. Dans tous les cas, je n’insulte pas ceux qui ne sont pas avec moi. C’est ma seule originalité.
Ce qui n’empêche pas de répondre à l’insulte. Et de rendre coup pour coup. Vertement.
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Albert Camus, « Dialogue pour le dialogue », Défense de l’homme n°10, juin 1949, page 2.
Le pouvoir des mots de Camus! On devrait tous être des résistants inconditionnés… Apprendre à critiquer, à résister à toutes les folies qu’on nous propose et devenir plus sage.
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